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Rendez moi ma fille, par Candice Cohen-Ahnine

Une jeune Française porte plainte en justice contre un membre de la famille royale saoudienne

 

Candice Cohen-Ahnine annonce, par l’intermédiaire de son avocate, Me Tarquiny-Charpentier, qu’elle porte plainte devant la justice française contre un membre de la famille royale saoudienne. Pour soustraction d’enfant, d’une part, et pour ce quelle a subi : viol, violences, séquestration. Rappelons que Candice Cohen-Ahnine est cette jeune Française de confession juive qui, depuis trois ans, se bat pour récupérer Haya, la fille qu’elle eue avec un prince saoudien et qui est aujourd’hui âgée de dix ans. Candice vient de publier, avec la collaboration de Jean-Claude Elfassi, un livre, Rendez-moi ma fille (L’Archipel), où elle raconte son combat.

En vacances à Londres, Candice, 18 ans, Française d’origine juive, tombe en 1997 amoureuse de Saddam, un prince saoudien appartenant à la famille royale. Une passion naît entre ces deux êtres que tout - la culture comme la religion - devrait séparer. Leur fille Haya voit le jour en 2001.

Hélas pour Candice, son prince charmant révèle vite un autre visage. Aveuglée par les sentiments qu’elle lui porte, elle subit son emprise, puis sa violence. Ne survivant que grâce à la bienveillance de certains domestiques, elle est séquestrée par la famille de son ex-compagnon durant six mois dans une chambre-cellule dépourvue de toute hygiène, ce qui la contraint à se raser la tête pour échapper à la vermine. Elle est maltraitée, battue, subissant des tortures morales insoutenables, jusqu’au jour où elle parvient à se réfugier à l’ambassade de France.

Depuis septembre 2008, Haya est retenue prisonnière en Arabie Saoudite dans la famille de son père. Tandis que Candice, échappant à une condamnation à mort, a été exfiltrée par le Quai d’Orsay.

Depuis sa fuite, elle se bat sans relâche pour qu’Haya lui soit rendue… Haya étant une enfant naturelle, tous les droits sont en principe dévolus à la mère, selon la loi islamique. Le ministre des affaires étrangères saoudien, grand-oncle d’Hayat, justifie le retrait de l’enfant au motif de l’apostie de la mère. Le combat de Candice est d’autant plus difficile qu’aucune convention bilatérale n’existe avec la France concernant la protection des mineurs.

 

Candice Cohen-Ahnine, née en 1977, souhaite porter son histoire à la connaissance de tous. Plusieurs procédures pénales et civiles sont en cours, les plus hautes instances de l’État s’étant mobilisées. Ce dossier devrait ces prochains jours connaître des rebondissements judiciaires…

 

Candice Cohen-Ahnine Rendez-moi ma fille 264 pages – 18,95 €

Contact presse : Lio Fitoussi Contact : Me Tarquiny-Charpentier

Tél. : 06 07 77 11 34 Tél. : 01 40 06 08 95

presse@rendezmoimafille.com laurence.tarquiny@noos.fr

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Candice: "Jamais sans ma fille" Aya

 

Candice Cohen-Ahnine, une Française juive de 34 ans, se bat depuis deux ans et demi pour revoir sa fille de dix ans, Aya, qu'elle a eue avec un prince saoudien. Une histoire d'amour impossible, suivie d'un combat chaotique, qu'elle raconte dans une autobiographie bouleversante, «Rendez-moi ma fille» (L’Archipel).

Marie Desnos - Parismatch.com

 

Seule une lettre sépare son prénom du mot «candide». C’est d’ailleurs ainsi que l’a décrite Jean-Claude Elfassi, qui a écrit son livre en collaboration avec Candice Cohen-Ahnine: «Candice agit plus avec son cœur, qu’avec sa tête.» Cette Française de 34 ans se bat depuis près de trois ans pour récupérer sa fille, d’aujourd’hui dix ans, retenue en Arabie saoudite par son père, un membre de la famille royale. Après des années de combat dans l’ombre, elle a finalement décidé d’exposer son histoire au grand jour, en publiant «Rendez-moi ma fille», aux éditions L’Archipel, et en répondant aux médias.

Candice a rencontré Sattam en 1997. Elle avait alors 20 ans. En vacances à Londres avec une amie, elle tombe sous le charme de ce «grand brun au visage étroit et au menton volontaire». Qui n’en aurait pas fait autant? Ce jeune homme charmant et mystérieux a visiblement jeté son dévolu sur la jolie brune à la peau dorée. Il la couvre de cadeaux –le premier étant un magnum de Cristal Roederer- l’invite au restaurant «le plus souvent possible»… avec toutes les attentions de gentleman qui vont avec. Et puis, c’est un «prince»… Au début, cela la fait rire: «Un vrai prince? Comme celui des contes de fées de notre enfance?», s'interroge-t-elle. Un conte de fée qui allait virer au cauchemar.

Elle a conscience que tout les sépare, à commencer par la religion -elle est de confession juive. Mais malgré sa lucidité, elle tombe dans le piège de l’amour et de la vie de princesse qui s’offre à elle (elle n’est pas cupide mais «Sattam est riche, très riche», et elle n’a pas honte de reconnaître que «cette vie de "rêve" [lui] a forcément tourné la tête».) Et puis tout s’accélère. Après les vacances, Sattam et Candice ne cessent de se téléphoner. En bon «prince», il lui fait la surprise de débarquer au bas de la fenêtre de son appartement parisien. Ils ne peuvent pas vivre l’un sans l’autre, et pourquoi devraient-ils le faire puisque l’héritier de la couronne a les moyens d’offrir à sa bien-aimée des billets d’avion pour le suivre dans ses déplacements.

Du rêve au cauchemar

Ils se partagent entre Le Caire, Paris, et Riyad, et vivent un rêve éveillé jusqu’à ce qu’une première tempête viennent assombrir leur ciel. Pour son plus grand bonheur, Candide tombe enceinte. Mais quand elle annonce l’heureux événement à l’«homme de sa vie», elle tombe des nues. Sattam change du tout au tout. Il lui explique que ce n’est pas possible; qu’elle ne peut pas garder l’enfant. C’est le coup de massue. Candide tente de se suicider avec des médicaments, et pendant qu’elle est «dans les vapes», son cher et tendre l’emmène se faire avorter. Rien ne sera jamais plus comme avant.

Si Candice tombe «dans le panneau» à plusieurs reprises, comme elle le dit elle-même. Le couple alternera dès lors périodes de réconciliations –des parenthèses enchantées-, et périodes de déchirements et désillusions. En 2001, Candide tombe enceinte à nouveau. Mais cette-fois, Sattam semble ravi. Si quelques doutes envahissent la jeune femme, l’envie d’avoir cet enfant en plus fort; et pas question d’avorter encore une fois. Aya («Vivante» en hébreu) naît le 27 novembre 2001 à Hyères, dans le Var. Mais Candice a à peine le temps de savourer son bonheur. Sattam est absent à l’accouchement. Il est en train de faire la fête à Londres. Nouveau désenchantement. Elle apprend que sa belle-mère n’est même pas au courant de sa grossesse…

Malgré tout, il réussira une fois de plus à la récupérer de justesse. Rebelote. En 2006, un problème latent explosera à la figure de Candice: Sattam doit épouser une cousine; il veut garder la Française comme seconde épouse. Elle s’y refuse catégoriquement. Il se montre de plus en plus autoritaire et violent. La viole. Elle fuit à Paris. C’est en 2008 qu’elle commettra son ultime erreur: accepter, à force d’efforts, virant au harcèlement, de Sattam, de lui rendre visite en Arabie saoudite avec leur fille.

Là, on leur confisque leurs passeports, et Candice est enfermée dans une chambre sans savon, et pas nettoyée, à tel point elle est contrainte de se raser le crâne pour échapper aux poux... Elle dit avoir été «maltraitée, battue, subissant des tortures morales, et ne survivant que grâce à la bienveillance de certains domestiques». Et sa fille, qu’elle croise par miracle, lui raconte aussi avoir reçu des gifles, et dormir parfois avec une femme qui l’oblige à rester «nue en petite culotte», et à la laver… Puis trois semaines plus tard, Candice parvient à s’enfuir. Elle court se réfugier à l’ambassade de France qui lui offre une protection diplomatique. Elle réussit même à avoir un droit de visite: quelques minutes, une fois par semaine, pour voir sa petite Aya. Jusqu’au jour où la famille royale tente le tout pour le tout: Candice est accusée d’avoir renié sa religion musulmane pour se convertir au judaïsme, crime pour lequel elle encourt… la peine de mort. Candice n'a plus d'autre choix que de fuir. En juin 2009, elle est exfiltrée par le Quai d'Orsay. C’est la mort dans l’âme qu’elle laisse sa fille à plus de 3000 kilomètres d’elle… Le 24 juillet 2009, elle porte plainte pour soustraction de mineur. Et c’est sans relâche qu’elle se bat depuis pour qu’Aya lui soit rendue.

Un combat de longue haleine

Mais la justice et la diplomatie sont lentes et compliquées, et ce d’autant plus qu’aucune convention bilatérale n’existe entre l’Arabie Saoudite et la France concernant la protection des mineurs. «Dès qu’on a eu connaissance, en 2008, des difficultés rencontrées par Candice, tant à Riyad qu’à Paris, on a suivi le dossier avec la plus grande attention», a nous pourtant affirmé Eric Bosc, adjoint au porte-parole en charge des Droits de l’homme et des Français à l’étranger au ministère des Affaires étrangères. La maman de 34 ans a notamment été reçue au cabinet du président de la République, et le Quai d’Orsay, qui est en contact permanent avec les autorités locales à ce sujet, veille à ce que les décisions de justices soient transmises aux personnes concernées. «La petite fille, en tant que citoyenne française, bénéficie de la protection consulaire», a-t-il souligné. De fait, l’ambassade a des contacts réguliers avec la famille royale saoudienne, incluant des droits de visite.

Candice a obtenu une première victoire judiciaire le 12 janvier: le Tribunal de Grande Instance de Paris lui a accordé «l’autorité parentale exclusive» sur sa fille, dont «la résidence habituelle» a été fixé au domicile maternel. La décision précise en outre que «les sorties à l’extérieur seront interdites», et que le père aura donc «un droit de visite à exercer en lieu neutre, (…) afin de garantir la représentation de l’enfant sur le territoire national.» Elle impose enfin à Sattam une pension alimentaire de 10 000 euros par mois, jusqu’à la majorité de sa fille. «C’est la première étape d’un long chemin, a commenté l’avocate de Candice», Me Tarquiny-Charpentier. C’est aussi la première fois qu’un membre de la famille royale saoudienne se trouve ainsi condamné. «Il faut qu’Haya soit rendue à sa mère et qu’elle puisse vivre en France où elle a toujours vécu.»

Mais en l’espèce, la justice française se retourne contre un ressortissant étranger, ce qui complique l’application de l’ordonnance. S’il ne rend pas l’enfant, le père s’expose à ce que soit délivré contre lui un mandat d’arrêt international. Pour le moment, «la décision est toute fraîche, tempère Eric Bosc. On en est à une phase de contentieux entre la position défendue par la mère, et celle défendue par la famille saoudienne. On souhaite réussir à instaurer un dialogue entre les deux parties, afin d’obtenir un dénouement favorable.» Une issue qui semble peu probable, sachant que Sattam exclut toute option qui inclurait qu’Aya vive ailleurs qu’à Riyad. «La vie de mon enfant est ici», a-t-il fait valoir à Sophie Des Déserts, du «Nouvel Observateur», seule journaliste à avoir réussi à le joindre. «Je vous rappelle que ma fille est une descendante de la famille royale saoudienne.» Aya n’a pas vu sa mère depuis deux ans et demi. Cette dernière doit se contenter de quelques minutes par téléphone au bon vouloir du Palais. Quelques minutes sous surveillance où la mère et la fille parlent de tout et de rien. Comme si de rien n’était. Tandis qu’elle s’inquiète de voir des photos de sa fille, sur Facebook, en niqab ou jouant avec des armes…

Haya, 10 ans, prisonnière en Arabie Saoudite. Que fait l'Etat français ?

Scandale dans la Sarkozye diplomatique. Haya, petite fille de nationalité française âgée de 10 ans, est captive en Arabie Saoudite ! Sa mère, Candice, se bat depuis 2008 pour pouvoir récupérer sa fille et raconte dans son livre « Rendez-moi ma fille » l'enfer de son combat.

(Candice et sa fille Haya)

Le décor dans lequel se noue l’épouvantable affaire que je vais vous raconter, nous le connaissons à peu près, vous et moi, gens de simple bon sens et d’humble bonne volonté : c’est celui de l’Arabie Saoudite, pays des droits inhumains.
Nicolas Sarkozy, dans son discours prononcé à Riyad, le 14 janvier 2008, a sans doute été l’un des seuls Français à soutenir la thèse étrange selon laquelle « la France et l’Arabie Saoudite ont des valeurs communes ». Mais que voulez-vous, les affaires sont les affaires et il faut ménager les princes...
Il faut tant les ménager que la diplomatie française, depuis 2008, a abandonné une petite fille française, Haya, retenue par son père, le prince Sattam bin Khaled bin Nasser bin Abdul Aziz, membre de la famille royale Al Saoud, dans son palais de Riyad.

Cette enfant, qui a aujourd’hui 10 ans, a été arrachée à sa mère, Candice Cohen-Ahnine, qui avait accepté de venir voir le père princier avec la petite - enfant naturelle, donc aucun droit de l’Arabie sur elle - pour une semaine. Candice a été séquestrée dans des conditions abjectes dans ce fameux palais où elle aurait pu disparaître, n’eûssent été sa force vitale et l’amour qu’elle porte à sa fille. C’est grâce à un téléphone portable planqué derrière une pierre de sa chambre-cellule qu’elle a réussi, à l’époque ( 2008) à joindre ses parents en France, son réseau facebook et notre ambassade à Riyad.

Quand la justice française semble faire barrage

Attention : ceci ressemble à un film, mais ça n’en est pas un. C’est déjà un livre - publié aux éditions de l’Archipel - où Candice raconte son calvaire. Et celui de sa petite fille qui a été frappée, victime d’attouchements de la part de sa tante paternelle, interdite de mentionner sa mère, « cette folle » comme le lui crachaient au visage la grand-mère et la tante saoudiennes.

Mais c’est aussi une affaire politique dans laquelle on voit la diplomatie française, sous Bernard Kouchner, puis sous Michèle Alliot-Marie, se coucher devant le caprice atroce d’une famille princière tribale qui a décidé, au mépris de toutes les lois internationales, françaises et même islamiques (notamment celles du tribunal islamique de Beyrouth), que l’enfant Haya lui appartenait.

Le 1er janvier 2012, le jugement du tribunal de Grande instance de Paris a attribué la garde de l’enfant à la mère, en France. Cette décision, traduite en arabe, est adressée ces jours-ci par le procureur à l’ambassade de France à Riyad afin que la petite Haya soit immédiatement rendue à sa mère.
Sa mère, qui ne l’a jamais revue depuis septembre 2008 et ne peut la joindre qu’une fois par mois ( dans les bons moments) quand la princesse Worod — grand-mère paternelle d’Haya — accepte de la lui passer. Les brefs messages de notre petite compatriote captive au fond d’un palais, dans une société et un monde archaïques, sont clairs : « Maman, tu me manques, quand est-ce que le monsieur de l’ambassade va venir me chercher ?... »

Mais le Monsieur de l’Ambassade ne vient pas. Ni la Dame consule, Madame Xavière Moussa, grande amie de la princesse Worod avec laquelle elle venait prendre le thé régulièrement. La Dame Consule avait tenté, en pleine captivité de Candice au palais, de lui faire signer en 2008 un document d’abandon pur et simple de l’enfant.
Extraits de cette conversation entre la responsable consulaire et la ressortissante française, mère d’une petite Française. Pardonnez-moi si je martèle le mot « Française » à toutes les lignes, cela alourdit le style mais c’est que je sens, à chacune de ces lignes, le poids écrasant de l’abandon de nos ressortissantes par les représentants de leur patrie. Extraits, donc :
« Faites-moi confiance, insiste Madame Moussa, signez ce document et vous pourrez rentrer en France et entamer une procédure là-bas... »
Sur ce, elle se tourne vers Worod et lui parle en arabe : « Tu sais, tu peux laisser repartir Candice, tu l’attaqueras en justice là-bas, l’important, c’est que tu gardes Haya.... »

Le reste est dans le livre. Ce qui n’y est pas, je l’ai recueilli auprès de l’avocate de Candice, Me Laurence Charpentier-Tarquiny, qui est tombée des nues quand elle a repris le dossier il y a un an en s’apercevant des innombrables retards pris dans les procédures en raison de la mauvaise volonté des précédents avocats « recommandés par le Quai d’Orsay » et qui auraient été chargés de faire gagner du temps aux Altesses Royales des sables.

La loi des pétrodollars

Me Charpentier-Tarquiny me relate l’étrange réunion, en novembre 2010 au Quai d’Orsay, entre elle-même, Candice et une certaine Madame Le Pollotech, adjointe au sous-directeur de la direction des droits des personnes au ministère des Affaires étrangères. Etait également présent Nicolas Guilloux, proche conseiller juridique de Michèle Alliot-Marie.
« Madame le Pollotech nous a expliqué que la princesse Worod avait fait d’Haya sa petite princesse ottomane que dans ces conditions il serait très difficile de récupérer la petite, que Candice était jeune et jolie, qu’elle avait tout intérêt à refaire sa vie en pensant à d’autres enfants », raconte l’avocate.

Si Candice, quand je l’ai rencontrée, étouffait presque en me relatant cette entrevue, Me Charpentier-Tarquiny explique, elle, froidement : « Ce discours a eu le mérite de nous faire comprendre que l’Etat français ne ferait rien pour récupérer une petite Française. Nous avons compris que c’était à nous, comme Candice le fait depuis 2008, de nous débrouiller... de toute façon les paroles décourageantes de Madame le Pollotech suivaient directement une conversation téléphonique entre elle et l’ambassadeur de France à Riyad, Mr Bertrand Besancenot. Il est clair que les choses sont bloquées là-bas par crainte de déplaire à la famille royale.. »

J'ai téléphoné au Ministère des Affaires étrangères. J'ai contacté Eric Bosc, directeur adjoint au Porte-parole du Quai d'Orsay, chargé des Français de l'étranger, de leur protection et des questions humanitaires. Je pensais que cette sinistre affaire avait sinué dans les méandres du ministère. Erreur.
« Nous connaissons bien l'affaire depuis plusieurs années, me répond Eric Bosc, d'ailleurs la mère s'est livrée à une offensive médiatique... »
Je corrige :
« Je dirais plutôt une... défensive! Elle a été séquestrée et on lui a tout de même pris son enfant ! »
« Bon, bon..., poursuit-il, en tous cas elles ont été reçues par les autorités consulaires et bénéficient de leur protection »
« Etiez-vous en poste lorsque s'est déroulé, dans les murs du ministère, à Paris, l'entretien au cours duquel une fonctionnaire a conseillé à Candice de renoncer à l'enfant? »
« Oui, j'étais là en novembre 2010 mais les propos rapportés me semblent étranges. Par ailleurs, qu'aurait pu faire concrètement l'Ambassade de France en Arabie Saoudite? On ne va tout de même pas aller chercher l'enfant pour la mettre dans un avion! Si un jugement vient d'être rendu, nous n'avons pas à nous prononcer. Il sera transmis aux autorités saoudiennes mais le Quai d'Orsay ne va pas interférer. »

La conversation se termine. Elle m'a semblé irréelle bien qu'Eric Bosc ne se soit pas dérobé aux questions posées. Mais il y a répondu en confirmant une évanescence tragique, un évanouissement du devoir de solidarité de l'Etat avec ses ressortissants en danger.

Voilà où nous en sommes. L’histoire d’amour - qui a entraîné l'histoire de haine entre le père et la mère de la petite Haya - est certes marquée du sceau du mensonge : le prince Sattam, pour mieux séduire Candica Cohen à Londres, lui avait fait croire qu’il était d’une lointaine ascendance juive cachée. Mais cela, c’est l’histoire intime, la confrontation ensuite entre une Candice que le père de son enfant accuse en Arabie d’être une musulmane convertie au judaïsme, donc coupable d’apostasie, donc passible de mort. C’est à cela que la jeune femme a échappé, en étant exfiltrée.

Mais la toile de fond reste le scandale politique : celui d’une Sarkozye pleine d'empathie et de complaisance pour la tribu royale qui règne sur les contrats en pétrodollars. Qu’est-ce que la liberté d’une petite Française, que sa famille saoudienne, après tout, peut marier à 10 ans ( comme le redoute Candice) en vertu des non-lois de ce terrible pays ? L’essentiel, ce n’est pas la protection d’une enfant, ni le droit, ni la loi.
C’est le reste. Ce reste dont notre honneur meurt.

Lundi 23 Janvier 2012

Martine Gozlan

Haya, 10 ans, prisonnière en Arabie Saoudite. Que fait l'Etat français ?

Scandale dans la Sarkozye diplomatique. Haya, petite fille de nationalité française âgée de 10 ans, est captive en Arabie Saoudite ! Sa mère, Candice, se bat depuis 2008 pour pouvoir récupérer sa fille et raconte dans son livre « Rendez-moi ma fille » l'enfer de son combat.

(Candice et sa fille Haya)

Le décor dans lequel se noue l’épouvantable affaire que je vais vous raconter, nous le connaissons à peu près, vous et moi, gens de simple bon sens et d’humble bonne volonté : c’est celui de l’Arabie Saoudite, pays des droits inhumains.
Nicolas Sarkozy, dans son discours prononcé à Riyad, le 14 janvier 2008, a sans doute été l’un des seuls Français à soutenir la thèse étrange selon laquelle « la France et l’Arabie Saoudite ont des valeurs communes ». Mais que voulez-vous, les affaires sont les affaires et il faut ménager les princes...
Il faut tant les ménager que la diplomatie française, depuis 2008, a abandonné une petite fille française, Haya, retenue par son père, le prince Sattam bin Khaled bin Nasser bin Abdul Aziz, membre de la famille royale Al Saoud, dans son palais de Riyad.

Cette enfant, qui a aujourd’hui 10 ans, a été arrachée à sa mère, Candice Cohen-Ahnine, qui avait accepté de venir voir le père princier avec la petite - enfant naturelle, donc aucun droit de l’Arabie sur elle - pour une semaine. Candice a été séquestrée dans des conditions abjectes dans ce fameux palais où elle aurait pu disparaître, n’eûssent été sa force vitale et l’amour qu’elle porte à sa fille. C’est grâce à un téléphone portable planqué derrière une pierre de sa chambre-cellule qu’elle a réussi, à l’époque ( 2008) à joindre ses parents en France, son réseau facebook et notre ambassade à Riyad.

Quand la justice française semble faire barrage

Attention : ceci ressemble à un film, mais ça n’en est pas un. C’est déjà un livre - publié aux éditions de l’Archipel - où Candice raconte son calvaire. Et celui de sa petite fille qui a été frappée, victime d’attouchements de la part de sa tante paternelle, interdite de mentionner sa mère, « cette folle » comme le lui crachaient au visage la grand-mère et la tante saoudiennes.

Mais c’est aussi une affaire politique dans laquelle on voit la diplomatie française, sous Bernard Kouchner, puis sous Michèle Alliot-Marie, se coucher devant le caprice atroce d’une famille princière tribale qui a décidé, au mépris de toutes les lois internationales, françaises et même islamiques (notamment celles du tribunal islamique de Beyrouth), que l’enfant Haya lui appartenait.

Le 1er janvier 2012, le jugement du tribunal de Grande instance de Paris a attribué la garde de l’enfant à la mère, en France. Cette décision, traduite en arabe, est adressée ces jours-ci par le procureur à l’ambassade de France à Riyad afin que la petite Haya soit immédiatement rendue à sa mère.
Sa mère, qui ne l’a jamais revue depuis septembre 2008 et ne peut la joindre qu’une fois par mois ( dans les bons moments) quand la princesse Worod — grand-mère paternelle d’Haya — accepte de la lui passer. Les brefs messages de notre petite compatriote captive au fond d’un palais, dans une société et un monde archaïques, sont clairs : « Maman, tu me manques, quand est-ce que le monsieur de l’ambassade va venir me chercher ?... »

Mais le Monsieur de l’Ambassade ne vient pas. Ni la Dame consule, Madame Xavière Moussa, grande amie de la princesse Worod avec laquelle elle venait prendre le thé régulièrement. La Dame Consule avait tenté, en pleine captivité de Candice au palais, de lui faire signer en 2008 un document d’abandon pur et simple de l’enfant.
Extraits de cette conversation entre la responsable consulaire et la ressortissante française, mère d’une petite Française. Pardonnez-moi si je martèle le mot « Française » à toutes les lignes, cela alourdit le style mais c’est que je sens, à chacune de ces lignes, le poids écrasant de l’abandon de nos ressortissantes par les représentants de leur patrie. Extraits, donc :
« Faites-moi confiance, insiste Madame Moussa, signez ce document et vous pourrez rentrer en France et entamer une procédure là-bas... »
Sur ce, elle se tourne vers Worod et lui parle en arabe : « Tu sais, tu peux laisser repartir Candice, tu l’attaqueras en justice là-bas, l’important, c’est que tu gardes Haya.... »

Le reste est dans le livre. Ce qui n’y est pas, je l’ai recueilli auprès de l’avocate de Candice, Me Laurence Charpentier-Tarquiny, qui est tombée des nues quand elle a repris le dossier il y a un an en s’apercevant des innombrables retards pris dans les procédures en raison de la mauvaise volonté des précédents avocats « recommandés par le Quai d’Orsay » et qui auraient été chargés de faire gagner du temps aux Altesses Royales des sables.

La loi des pétrodollars

Me Charpentier-Tarquiny me relate l’étrange réunion, en novembre 2010 au Quai d’Orsay, entre elle-même, Candice et une certaine Madame Le Pollotech, adjointe au sous-directeur de la direction des droits des personnes au ministère des Affaires étrangères. Etait également présent Nicolas Guilloux, proche conseiller juridique de Michèle Alliot-Marie.
« Madame le Pollotech nous a expliqué que la princesse Worod avait fait d’Haya sa petite princesse ottomane que dans ces conditions il serait très difficile de récupérer la petite, que Candice était jeune et jolie, qu’elle avait tout intérêt à refaire sa vie en pensant à d’autres enfants », raconte l’avocate.

Si Candice, quand je l’ai rencontrée, étouffait presque en me relatant cette entrevue, Me Charpentier-Tarquiny explique, elle, froidement : « Ce discours a eu le mérite de nous faire comprendre que l’Etat français ne ferait rien pour récupérer une petite Française. Nous avons compris que c’était à nous, comme Candice le fait depuis 2008, de nous débrouiller... de toute façon les paroles décourageantes de Madame le Pollotech suivaient directement une conversation téléphonique entre elle et l’ambassadeur de France à Riyad, Mr Bertrand Besancenot. Il est clair que les choses sont bloquées là-bas par crainte de déplaire à la famille royale.. »

J'ai téléphoné au Ministère des Affaires étrangères. J'ai contacté Eric Bosc, directeur adjoint au Porte-parole du Quai d'Orsay, chargé des Français de l'étranger, de leur protection et des questions humanitaires. Je pensais que cette sinistre affaire avait sinué dans les méandres du ministère. Erreur.
« Nous connaissons bien l'affaire depuis plusieurs années, me répond Eric Bosc, d'ailleurs la mère s'est livrée à une offensive médiatique... »
Je corrige :
« Je dirais plutôt une... défensive! Elle a été séquestrée et on lui a tout de même pris son enfant ! »
« Bon, bon..., poursuit-il, en tous cas elles ont été reçues par les autorités consulaires et bénéficient de leur protection »
« Etiez-vous en poste lorsque s'est déroulé, dans les murs du ministère, à Paris, l'entretien au cours duquel une fonctionnaire a conseillé à Candice de renoncer à l'enfant? »
« Oui, j'étais là en novembre 2010 mais les propos rapportés me semblent étranges. Par ailleurs, qu'aurait pu faire concrètement l'Ambassade de France en Arabie Saoudite? On ne va tout de même pas aller chercher l'enfant pour la mettre dans un avion! Si un jugement vient d'être rendu, nous n'avons pas à nous prononcer. Il sera transmis aux autorités saoudiennes mais le Quai d'Orsay ne va pas interférer. »

La conversation se termine. Elle m'a semblé irréelle bien qu'Eric Bosc ne se soit pas dérobé aux questions posées. Mais il y a répondu en confirmant une évanescence tragique, un évanouissement du devoir de solidarité de l'Etat avec ses ressortissants en danger.

Voilà où nous en sommes. L’histoire d’amour - qui a entraîné l'histoire de haine entre le père et la mère de la petite Haya - est certes marquée du sceau du mensonge : le prince Sattam, pour mieux séduire Candica Cohen à Londres, lui avait fait croire qu’il était d’une lointaine ascendance juive cachée. Mais cela, c’est l’histoire intime, la confrontation ensuite entre une Candice que le père de son enfant accuse en Arabie d’être une musulmane convertie au judaïsme, donc coupable d’apostasie, donc passible de mort. C’est à cela que la jeune femme a échappé, en étant exfiltrée.

Mais la toile de fond reste le scandale politique : celui d’une Sarkozye pleine d'empathie et de complaisance pour la tribu royale qui règne sur les contrats en pétrodollars. Qu’est-ce que la liberté d’une petite Française, que sa famille saoudienne, après tout, peut marier à 10 ans ( comme le redoute Candice) en vertu des non-lois de ce terrible pays ? L’essentiel, ce n’est pas la protection d’une enfant, ni le droit, ni la loi.
C’est le reste. Ce reste dont notre honneur meurt.

Lundi 23 Janvier 2012

Martine Gozlan

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