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Ce que la science recommande pour bien se laver les mains

Contrairement à ce que l’on peut penser, l’efficacité du lavage des mains ne dépend ni de la température de l’eau, ni de la quantité de savon.

Par Pierre Barthélémy

IMPROBABLOLOGIE. En admettant que vous lisiez cette chronique dans sa version papier, il y a de fortes chances pour que vos doigts, après avoir feuilleté Le Monde et ses suppléments, aient pris une teinte grisâtre. Les poètes chanteraient que nos mots s’imprègnent en vous, les purement factuels disent que l’encre est migratrice. Direction la salle de bains, donc. Halte là ! Vous laver les mains ? Mais savez-vous seulement comment bien vous y prendre ? Avez-vous vérifié ce que dit la recherche à ce sujet ?

Consulter la littérature scientifique, c’est ce qu’a fait une équipe américaine associant des chercheurs de l’université Rutgers (New Jersey) et de GOJO, un industriel du savon liquide. Leur étude est parue en mai dans le Journal of Food Protection. Et c’est une litote que de dire qu’ils ne sont pas tendres avec leurs prédécesseurs à qui ils passent un véritable savon (ouarf) : « La littérature sur le lavage de mains comporte une quantité phénoménale de fausses informations et manque de données sur de nombreux problèmes. » Bref, il est temps de faire le ménage (re-ouarf) là-dedans, notamment pour ce qui concerne la température idéale pour se débarrasser des microbes. On sait que se laver à l’eau bouillante présente l’avantage de détruire les cellules bactériennes, mais aussi l’inconvénient de ­détruire les cellules de la peau…

Bactérie fécale

Face à ces données manquantes ou contradictoires, nos chercheurs sont repartis de zéro et ont testé, sur une vingtaine de braves volontaires, quatre grands paramètres du lavage de mimines : temps de frottage (5, 10, 20 ou 40 secondes), température de l’eau (15, 26 ou 38° C), quantité de savon (0,5, 1 ou 2 millilitres), type de savon (classique ou antibactérien, mais au pH équivalent). Les sujets ne devaient plus utiliser de produit antimicrobien, ne pas avoir de coupure sur les mains, ne pas avoir pris d’antibiotiques au cours des six semaines précédentes et surtout ne pas être dégoûtés par ce qu’on allait répandre sur eux.

Car qui dit « expérience sur le lavage de mains » dit « mettons une belle cochonnerie sur les paluches pour voir ce qui part et ce qui reste ». On hésitait ­entre le cambouis et le lisier de porc, mais les chercheurs ont opté pour une souche non pathogène d’Escherichia coli – bactérie fécale très commune chez Homo sapiens – élevée en laboratoire. Avant chaque test, 1 millilitre de ce bouillon de culture était versé sur les mains des « cobayes » qui devaient consciencieusement étaler la gadouille sur leurs pinces. Suite à cet encrassage, les sujets passaient à la phase savonneuse de l’expérience. Une fois leurs mains lavées, on déterminait la quantité de bactéries restantes grâce à la méthode dite du « jus de gants ». Celle-ci consiste à glisser sa main dans des gants en plastique propres, à y verser une solution, à bien masser les doigts pour décoller le maximum de choses puis à récupérer et analyser le jus ainsi obtenu. Enfin, on décontaminait les papattes de ces gentils volontaires.

Les résultats sont les suivants : pas de différences significatives entre hommes et femmes, entre les températures testées, entre les quantités de savon utilisées. La performance du savon antibactérien semble un peu meilleure que celle du savon classique mais la différence est si faible qu’elle tombe dans la marge d’erreur. La seule variable vraiment importante si vous voulez vous débarrasser de vos microbes, c’est la durée de frottage : 5 secondes ne suffisent pas, mais à partir de 10 c’est bon. Voilà, vous pouvez refermer le journal et aller à la salle de bains.

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