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Les juifs amazighs, de l’Atlas à Israël

 

 

 

Il existe des films qui abordent, de manière neutre et attachante, les questions des minorités ethniques et celles relatives aux ambiguïtés politico-religieuses. Parmi eux, il y a lieu de citer Tinghir – Jérusalem, les Echos du Mellah. Un documentaire marocain qui suscite actuellement un vacarme médiatique.

 

Si les uns apprécient cette oeuvre pour son investigation de longue haleine sur les juifs marocains, d’autres appellent au boycott d’une oeuvre qui « normalise (les relations) avec l’Etat hébreu ». Quoi qu’il en soit, le film ne laisse pas indifférent.

« En France, j’ai grandi avec l’idée que tous les Amazighs étaient musulmans. Mais à Tinghir, ma ville natale dans l’Atlas marocain, les récits de mes grands-parents m’ont fait découvrir que d’autres Amazighs étaient juifs. Pourtant, au début des années 1960, malgré plus de 2000 ans d’histoire commune, tous ces juifs quittent l’Atlas. Je pars à la rencontre de cette mémoire enfouie auprès de la génération qui a connu cette présence juive. Mais très vite cette recherche me mène en Palestine où je retrouve quelques-unes des familles originaires de Tinghir. Grâce à elles, mon film est sorti des limbes il y a un an environ », raconte l’historien et réalisateur marocain Kamal Hachkar.

Ce jeune homme de 33 ans décide il y a quelques années de lever le voile sur les juifs tinghiris et leur départ du Maroc. Le film évoque également le devenir des autres juifs marocains. « J’ai travaillé 4 ans sur ce film. Ce fut une expérience formidable de recoller les morceaux de cette histoire », ajoute Kamal Hachkar. Le film se veut un hymne à l’altérité, aux identités plurielles, « voire un vaccin contre les extrémistes », lance le réalisateur.

Hymne à l’altérité

Perçants et acerbes, les témoignages du film dénoncent le racisme né au lendemain de la naissance des premiers courants obscurantistes du Maroc contemporain dans les années 1950 et 1960.

L’appel de Sion n’était alors qu’une des raisons de cette migration massive de 300 000 juifs en 1948. Aujourd’hui, il n’en reste que 7 000.

Coproduit par Les films d’un jour, une boîte de production française, et la deuxième chaîne marocaine 2M, le film est nostalgique de l’amitié judéo-musulmane, disparue comme par enchantement dès les premiers départs des juifs du grand Atlas marocain.

Pour Kamal Hachkar, le système éducatif marocain y est pour quelque chose. « L’absence de la notion de l’amitié judéo-musulmane des manuels scolaires marocains est un scandale. On construit une génération d’amnésiques dans nos pays. Il est vital que le gouvernement se conforme à la nouvelle Constitution marocaine qui reconnaît les identités plurielles de notre pays. Passons des mots aux actes ! C’est le meilleur moyen de contrecarrer les discours populistes et démagogiques ».

Anti-panarabisme ?

« Les islamistes et les panarabistes n’ont aucune sensibilité artistique. Le peuple marocain n’est pas dupe et nous savons que ces personnes ont toujours instrumentalisé le conflit israélo-palestinien. Ils ne peuvent pas comprendre que la composante juive est essentielle à l’identité marocaine et qu’on ne peut la nier. Depuis 3000 ans, les juifs sont sur le sol marocain et nous en sommes fiers, avance K. Hachkar. Que devrions-nous dire de cette plaie qu’a été le panarabisme ? Aujourd’hui, nous devons lutter et combattre nos propres extrémistes : ceux qui instrumentalisent la religion à des fins politiques. Ce sont les esprits étroits qui critiquent nos films parce que nous parlons des juifs. L’Egypte, à titre d’exemple, a bien signé la paix avec Israël … Nous devons combattre ensemble pour un Etat palestinien ».

Chez un grand nombre d’intellectuels marocains, le panarabisme — à l’état extrême — se vit comme un malaise, comme un appel au racisme à l’égard des Amazighs et des juifs par quelques panarabes qui prétendent à une supériorité intellectuelle.

Malgré les critiques, le film connaît un grand succès au Maroc et ailleurs. Il vient de décrocher le prix de la première oeuvre du Festival du film national de Tanger.

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