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Lettre à mes amis juifs

 

par Chems-eddine Hafiz

 

 

Chems-eddine Hafiz, avocat au Barreau de Paris et conseil de la Grande Mosquée de Paris, déplore vivement la montée de l’antisémitisme mais conjure la communauté juive de ne pas tenir pour responsable de cela la communauté musulmane. Il faut, écrit-il, «combattre ensemble et en bonne intelligence ce mal qui mine la société»

 

Au moment où ma religion est mise en cause de manière parti­culièrement injuste, je souhaite m’adresser à mes amis juifs.

En écrivant ces quelques lignes, je vois défiler les visages de beaucoup de personnes qui me sont proches, des intimes. Je suis musulman, ils sont juifs, mais la question ne s’est jamais posée entre nous. Cette amitié, c’est «parce que c’était lui, parce que c’était moi», comme l’a si bien écrit Montaigne. Je m’adresse à eux aujour­d’hui, en raison du lourd climat qui pèse sur notre pays, alimenté par des pyromanes, extrémistes en perdition et politiciens à courte vue, se rejoignant ainsi pour présenter l’islam comme une menace.

L’augmentation des actes antisémites est un fait avéré. Cet accroissement prend d’autant plus d’importance qu’il s’inscrit dans une montée générale de l’intolérance, s’exprimant désormais par des revendications xénophobes.

Oui, cet antisémitisme existe, et il est la motivation de crimes. Mais je veux dire avec force que l’islam n’en est ni la cause, ni l’origine. L’islam n’a rien à voir avec l’antisémitisme, et les musulmans ont toujours eu des sentiments généreux vis-à-vis des juifs, dont ils respectent, et admirent souvent, leur foi.

La seule clé d’analyse, c’est l’intolérance xénophobe qui s’affiche aussi bien contre les juifs que contre les musulmans. Notre devoir est de combattre ensemble et en bonne intelligence ce mal qui mine la société.

Les ressorts de l’antisémitisme en France sont puissants, et on s’interdirait de comprendre les problèmes d’aujourd’hui si on ­relativisait les enseignements de l’histoire. L’antisémitisme faisait ses ravages en France bien avant que l’islam ne soit la deuxième religion du pays. C’est au nom d’une notion dévoyée de la «France éternelle» qu’ont été signés à Vichy les actes conduisant à l’extermination de 80 000 juifs qui vivaient en France. Pendant ce temps, la même France refusait le statut de citoyen aux musulmans d’Algérie.

Là, vient la question du ­moment: y aurait-il un nouvel ­­­­an­ti­sémitisme qui engagerait ­­l’en­semble de la communauté mu­­­sul­­­mane, parce qu’elle ne ­saurait pas contrôler une frange ­d’extrémistes?

 

http://avocats.fr/space/chems-eddine.hafiz

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