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En Israël, des femmes religieuses réinventent leur mode

 

En Israël, des femmes religieuses réinventent leur mode

 

 

Les longues bottes de cuir sous la robe noire soulignent l'élégance de la silhouette, le maquillage est léger. Pour Nathalie Benhaïm, 40 ans, les règles de "modestie" dans le judaïsme --pour ne pas attirer l'oeil des hommes-- n'ont jamais été synonymes d'austérité.

"Je suis toujours maquillée et coiffée, je ne me laisse jamais aller. C'est important pour moi et pour mon mari", explique la mère de quatre enfants, qui vient d'ouvrir une boulangerie à Jérusalem.

Souvent partisans de Naftali Bennett, l'étoile montante de la droite nationaliste religieuse, les sionistes-religieux sont, contrairement à la grande majorité des juifs ultra-orthodoxes, des membres actifs de la société et des institutions israéliennes au sein desquelles nombre d'entre eux occupent des postes-clé.

Ils sont davantage exposés à l'influence de la population laïque, ce qui provoque de nombreux débats sur les interprétations de la "halacha", la loi juive, concernant l'habillement et le comportement des femmes.

Récemment, un des rabbins les plus stricts du mouvement, le rabbin Shlomo Aviner, a publié de nouvelles règles en la matière, interdisant notamment aux femmes de porter du rouge ou des couleurs vives et leur ordonnant d'éviter toute transparence et de n'utiliser que des collants opaques. Collants dont il a même jugé nécessaire de préciser le degré d'opacité: 40 deniers.

Mais cette lecture extrême de la loi juive provoque de nombreuses condamnations au sein même de la mouvance nationaliste-religieuse. D'autant que la mode pour les femmes de ces milieux prend de l'essor avec une multiplication des magasins et designers spécialisés.

"Il y a encore quelques années, la mode sioniste-religieuse, c'était le style hippie, baba-cool. Mais récemment un vrai style nationaliste-religieux s'est développé", explique Vered Gilboa, gérante d'une boutique du centre de Jérusalem.

"Ici c'est plutôt vintage, chiffons, dentelles. Mais il y a une multitude de tendances et de créateurs. Les femmes sionistes-religieuses s'intéressent de plus en plus à la mode, comme les femmes du reste de la société israélienne", ajoute-t-elle.

Au point que l'école de mode et de design Shenkar, la plus cotée d'Israël, dont est notamment sorti Alber Elbaz, créateur de Lanvin, a récemment créé un cours destiné à ce public.

Les règles vestimentaires pour les femmes dans le monde juif religieux se prêtent cependant peu à la créativité des couturiers: les décolletés sont interdits, jupes et robes doivent couvrir les genoux et les manches arriver au coude.

"On ne peut pas vivre dans une bulle"

Mais comme l'explique Nathalie Haïks, mère de 5 enfants, il est possible d'être coquette tout en restant fidèle à la loi juive. Son secret: les jupes et les tee-shirts basiques, à la longueur réglementaire.

"Une fois que l'on a mis cela, c'est possible de s'habiller dans n'importe quel boutique", explique Nathalie, 48 ans, assistante de direction à l'université hébraïque de Jérusalem.

"On ne peut pas vivre dans une bulle même s'il faut respecter les règles. La Torah n'impose pas aux femmes d'avoir un look tristounet. On est censé ne pas attirer l'oeil, c'est tout. La halacha ne donne pas une interprétation unique et définitive. C'est de plus plus en ouvert, beaucoup plus libre que lorsque je suis arrivée en Israël", assure-t-elle.

Lea Sheklar, une habitante d'Ofra, une colonie au nord de Ramallah, conjugue son intérêt pour la spiritualité juive et son goût pour les vêtements en organisant toutes les semaines un atelier pour femmes, dans un café de Jérusalem. Dans une salle à part, elle installe un miroir dans lequel les participantes sont invitées à se regarder et à s'admirer.

"La question des vêtements se pose trop souvent en termes d'interdiction. Ceux qui interdisent sont en fait obnubilés non par la Torah mais par cette chose qu'ils ne nomment jamais, le sexe", explique la quinquagénaire, la tête couverte d'un béret, élégante dans sa robe noire rehaussée d'une broche.

"J'essaie de voir comment vivre dans le monde pratiquant librement tout en respectant les règles. Dans mon atelier, nous parlons des vêtements comme moyen de découverte de soi", poursuit-elle.

"De nombreuses femmes sionistes-religieuses suivent la tendance de l'ensemble de la société et deviennent plus individualistes, elles veulent être heureuses, vivre leur féminité et leur identité en les faisant cohabiter harmonieusement avec le monde religieux", ajoute-t-elle.

 

 

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