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« Destins croisés. Solidarités entre juifs et Noirs aux Etats-Unis », sur Toute l’histoire : l’antiracisme, main dans la main

« Destins croisés. Solidarités entre juifs et Noirs aux Etats-Unis Â», sur Toute l’histoire : l’antiracisme, main dans la main

Rokhaya Diallo et David Rybojad racontent l’histoire de ces binômes militants qui se sont entraidés pour lutter ensemble contre le racisme et l’antisémitisme.

Par Mouna El Mokhtari


Printemps 1961, Alabama, Etats-Unis. « Le Ku Klux Klan a tiré dans les pneus pour stopper le bus, a brisé les vitres pour lancer les cocktails Molotov et a bloqué les portes de l’extérieur afin que tous périssent dans les flammes Â», se souvient l’historien Bob Zellner. Dans le bus, les Freedom Riders, des étudiants noirs et blancs qui mènent une campagne pour les droits civiques. Partis de Washington, ils comptent arriver à La Nouvelle-Orléans et traverser tout le Sud ségrégationniste, qui continue d’appliquer les lois Jim Crow, en dépit d’un arrêt de la Cour suprême qui a rendu illégale la ségrégation dans les transports en commun. Bob Zellner a perdu l’usage partiel d’un de ses yeux dans la bataille.

Ce documentaire aussi dense que passionnant raconte le parcours de figures noires et juives qui se sont unies pour lutter ensemble contre le racisme et l’antisémitisme, « les deux faces d’une même pièce Â», disait W. E. B. Du Bois (1868-1963), sociologue et premier Afro-Américain à obtenir un doctorat à Harvard.

« Dressez l’oreille Â»

« Les massacres et les lynchages visant les personnes noires étaient insupportables pour les personnes juives, qui venaient d’endroits où ils avaient déjà connu l’oppression et la discrimination Â», éclaire Susan Neiman, directrice du Einstein Forum. « Quand vous entendez dire du mal des juifs, dressez l’oreille, on parle de vous Â», disait Frantz Fanon, auteur de Peau noire, masques blancs, en 1952 (Seuil, 2015).

L’histoire qui nous est contée commence avec la fondation de la National Association for the Advancement of Colored People en 1909 et se termine avec l’obtention des droits civiques et l’assassinat de Martin Luther King, en 1968. A l’origine du film, David Rybojad s’intéressait au rabbin Abraham Joshua Heschel, frère de lutte du pasteur baptiste noir. « Nous sommes sortis des statistiques, des grandes dynamiques pour raconter des relations interpersonnelles, explique le réalisateur. On parle trop peu d’amitié, alors que c’est un véritable moteur. Â»

Ainsi de Booker T. Washington et Julius Rosenwald, qui ont fondé un réseau d’écoles pour les enfants noirs du sud du pays. Du père juif de l’anthropologie américaine Franz Boas et de son étudiante et cinéaste noire Zora Neale Hurston, qui ont déconstruit les théories raciales. Ou encore de Strange Fruit, poème d’Abel Meeropol chanté par Billie Holiday au légendaire club de jazz Café Society – l’un des rares endroits à New York qui bravaient la ségrégation.

Sans idéaliser les relations, parfois fratricides, entre les deux communautés aux Etats-Unis, les réalisateurs tissent un récit autant qu’une carte de l’émancipation. « Faire ce film, c’est aussi parler de nous, Français, et de ce que l’on pourrait faire ensemble Â», veut croire la réalisatrice Rokhaya Diallo, dont les engagements féministes et antiracistes ne sont plus à présenter.

Destins croisés. Solidarités entre juifs et Noirs aux Etats-Unis, de Rokhaya Diallo et David Rybojad (Fr. 2022, 52 min).



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