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RAPHAËL DEVICO, CE MAROCAIN…

RAPHAËL DEVICO, CE MAROCAIN…

 

 

Raphaël Devico publie aux Editions Biblieurope, un livre qui va faire date dans l’histoire de la communauté juive marocaine et au-delà, tant à l’intérieur du Royaume qu’à l’étranger, sous le titre : «Juifs du Maroc, des racines ou des ailes ?». Il sera très prochainement disponible en librairies.

Un livre qui fera date disons-nous parce que son auteur, Raphaël Devico, rentré au Maroc en 1965 après de brillantes études supérieures à Paris, est une personnalité connue dans les milieux économiques et financiers nationaux, mais aussi dans l’agroalimentaire et l’agro-industrie, un secteur où la famille Devico brille depuis des décennies par son dynamisme.

Raphaël Devico, actif dans des projets industriels, techniques et touristiques nombreux, a notamment réalisé avec son frère Mardochée, un exploit marquant, celui d’avoir été les premiers à produire des fraises dans le Gharb, en introduisant dans le Royaume des techniques de culture du fraisier jusque-là inconnues dès la fin des années 70. Cette « première» a permis de développer la culture de la fraise au point où, aujourd’hui, ce fruit qui était réservé aux plus riches, est devenu un produit de consommation courante et populaire.

Mais Raphaël Devico n’est pas seulement un opérateur dynamique ou un businessman averti. Il est l’un des membres actifs de la communauté juive de Casablanca, et descendant d’une lignée de juifs andalous venus à Fès après la chute de Grenade en 1492.

Et c’est son attachement profond, viscéral même à l’identité plurielle marocaine, sa passion de Marocain qui lui ont donné l’envie et la volonté d’aborder une thématique aussi forte qu’incontestable, la profonde immersion des Juifs dans l’histoire, la culture, les mœurs et les valeurs de la communauté nationale depuis des siècles. Devico s’est donc donné, à travers ce livre, une belle et double mission, celle de rappeler l’histoire des Juifs au Maroc, dans toutes les dimensions de leur présence pluri-séculaire et leurs apports à la civilisation de notre pays, mais également l’évolution de la communauté juive dans ce Maroc de l’après indépendance.

A la fois pluri-thématique et analytique, le livre de Raphaël Devico se veut témoignage et rappel de l’action et l’œuvre des grandes figures de sa communauté à travers les siècles et à notre époque, en un devoir de mémoire que chacun se doit de cultiver et d’enrichir.

Cette démarche est, sans nul doute, la plus prégnante, la plus nécessaire aussi, parce que les Juifs marocains ont toujours été des sujets et des citoyens à part entière dans notre pays. Devico est là pour le rappeler à tous, y compris aux membres de sa communauté, avec, bien souvent, des accents de sincérité que lui dictent son esprit libre et sa volonté de transcrire la vérité, fut-elle dérangeante pour certains…

Au moment où se manifestent des relents d’intolérance inacceptable, que des amalgames irresponsables émergent «en pleine rue», le livre de Raphaël Devico est plus que bienvenu parce qu’il remet en pleine lumière une réalité que personne ne peut nier.

La communauté juive marocaine, certes diminuée numériquement, est présente, active, citoyenne et revendique hautement son appartenance à ce Maroc, ce Royaume, ce pays qui l’abrite depuis plus de 2000 ans !

Le judaïsme marocain ne veut pas renoncer à ses racines, et les ailes sont faites pour venir et revenir au pays, que l’on peut parfois quitter mais qui, pour la diaspora juive marocaine, est dans le cœur de chacun de ses membres jusqu’à la fin des temps.

Fahd YATA

Entretien avec Raphaël Devico : “L’Histoire est un jardin…”

La Nouvelle Tribune : Vous venez de faire paraître un livre sous le titre « Juifs du Maroc, des racines ou des ailes? » Pourquoi ce titre et pourquoi ce livre, aujourd’hui ?

En fait, les juifs du Maroc, quel que soit l’endroit où ils se trouvent, restent attachés à leur pays d’origine. Comme les hirondelles, ils n’oublient pas de revenir visiter leur terre, leurs saints, leurs voisins.

Ils sont aujourd’hui 2000 à vivre au Maroc et plus de cinquante mille à revenir se ressourcer chaque année.

Poussé par mes petits enfants, et amis qui ont exprimé leur curiosité, j’ai ressenti le besoin de faire ressurgir cette grande histoire plusieurs fois millénaire.

L’écriture est un besoin, mais c’est aussi un moyen de partage.

Votre parcours professionnel est plutôt celui d’un opérateur économique, d’un industriel connu dans l’agro-industrie et l’agro-alimentaire. Quelles sont donc les motivations profondes qui vous ont donné envie d’écrire ?

Une bonne analyse politique, économique, scientifique, juridique ne peut être réalisée qu’à partir de références à l’histoire. D’ailleurs, les grandes Ecoles de commerce enseignent à leurs étudiants l’importance de la lecture.

Jacques ATTALI rappelle, dans son dernier ouvrage, qu’il est possible à tout individu d’exprimer sa personnalité aussi bien dans le militantisme le plus engagé, que dans l’entreprise et dans les arts.

Considérez-vous que désormais la « saga » de la communauté juive au Maroc est terminée ou bien cet ouvrage est-il destiné à en souligner la pérennité ?

Non, la « saga » de la communauté juive au Maroc n’est pas terminée.

Feu Haïm ZAFRANI, professeur émérite, a consacré toute sa vie à la préservation du patrimoine juif marocain.

Il eut été normal de créer au Maroc en exclusivité le prix Haïm ZAFRANI. Ceux qui prétendent représenter notre communauté ont raté cette occasion. Cet honneur est revenu à l’Institut Parisien d’Etudes juives Elie Wiesel.

Avec humilité, j’espère que cet essai contribuera à souligner la pérennité de cette belle «saga», pour reprendre vos termes.

(Une nouvelle page de la saga communautaire est en pleine écriture.)

Une grande partie de l’ouvrage est constituée d’une monographie sur l’histoire des juifs au Maroc avant 1912, leur statut juridique, mais aussi l’évocation de plusieurs personnalités juives marquantes, des derniers siècles jusqu’à l’époque présente. Pensez-vous que leur apport et leurs œuvres ont été minorés ou oubliés et qu’il vous fallait les rappeler ?

Vous avez utilisé le mot monographie ; mon essai n’est pas achevé. Il est destiné à être complété.

Cependant, j’ai essayé de mettre en contact le lecteur avec des faits vécus.

Oui, les apports et les œuvres des personnalités marquantes de la communauté juives sont importants. Par ignorance, ils sont minorés ou même oubliés. Et là encore, à qui la faute ?

L’histoire ne se refait pas, elle ressurgit !

Combien de Marocains savent par exemple que :

– Deux lauréats du Prix Nobel, l’un en médecine (1980), l’autre en physique (2012) sont d’origines marocaines. Les exemples sont légions : Amérique du Nord-Europe-Asie Etc….

– Le professeur émérite Ruben David Azoulay (1920-2012) président de l’académie de médecine et titulaire de la chaire de dermatologie et président de la société brésilienne de dermatologie.

– David Yulee Levy, fils de Elias Yulee Levy né à Rabat, est le premier sénateur juif de l’histoire des Etats-Unis, élu en 1845. A titre de reconnaissance son nom est donné à une ville de Floride Yulinton.

L’actualité de la communauté juive marocaine, en cette première partie du 21ème siècle, est assez mince dans votre livre. Pourquoi?

Son histoire s’arrête-t-elle à la présidence de feu David Amar ?

C’est vrai, cette actualité est mince. Y-a-t-il un responsable ?

Depuis le départ de feu David Amar en 1987, les comptes n’ont été présentés qu’une seule fois en 2004. Pas une seule réunion du Conseil des communautés depuis plus d’une dizaine d’années.

Certains faits relatés d’ailleurs par les medias, n’ont pas été pris en charge par les institutions communautaires, alors que c’est une de leurs principales responsabilités.

Les victimes n’avaient d’autres moyens que de s’exiler, compte tenu de leur état de santé, et de l’impossibilité de se reloger avec leurs petits moyens financiers. Les moyens communautaires permettent sans aucune difficulté de prendre en charge cette famille et d’autres.

Pour des raisons de confort, peut être, Serge Berdugo veut être à lui seul la Communauté. Il n’hésite pas à utiliser son énergie contre toute « initiative » afin d’en ralentir l’exécution. “El Faham Ifham”…

Il y a eu trop de rendez-vous manqués.

Cependant, cette grande histoire continuera d’être écrite même par ceux qui résident sous d’autres cieux. Ils sont 1.250.000 qu’on peut qualifier d’ambassadeurs.

Ils sont toujours prêts à se mettre en mouvement dès que les intérêts du pays l’exigent.

D’ailleurs, la mission confiée par Feu Hassan II à David Amar pour faire connaître la cause du Sahara Marocain a été un succès ; pour la pérenniser, il a initié, à Montréal, le Rassemblement Mondial du Judaïsme Marocain. Le poste de Président est réservé statutairement depuis au secrétaire général du conseil des communautés israélites du Maroc.

En Mai 1998, Feu le Roi Hassan II organisa la première réunion de l’Union Mondiale des Juifs Marocains à Marrakech.

Quel est le message qui sous-tend votre livre et votre démarche ? Que voulez-vous faire comprendre à vos lecteurs ?

La composante juive continue de bénéficier des droits identiques à ceux de leurs concitoyens musulmans.

Les chercheurs découvriront par leurs travaux la réalité de ce que fut cette coexistence.

A ceux qui veulent réécrire l’Histoire, il est utile de rappeler que les deux composantes de la population marocaine ont vécu dans une proximité ou seules « les prières et les fêtes religieuses les séparaient momentanément ».

Pour ma part, je pense que la radicalisation à laquelle nous assistons, n’est possible que si l’on perd les racines de son histoire.

Enfin, j’ai voulu rappeler aux lecteurs que la religion n’est pas la seule composante de la culture.

L’ignorance de la culture de l’autre fait naître des préjugés.

Nous avons tous un devoir de mémoire.

L’histoire est un jardin ou les fleurs rayonnent par leur beauté, à nous de les maintenir, les développer pour le bonheur des générations futures.

Entretien réalisé par Fahd Yata

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Il n'est pas anormal qu'un Juif marocain fasse l'éloge des personnalités juives marocaines qui ont apporté leur contribution au rayonnement du progrès dans tous les domaines.Mais dire que ceux qui ont choisi de rester vivre au Maroc sont des citoyens à part entière est une fiction.Peuvent-ils accéder à la magistrature et devenir juges par exemple?
Peuvent-ile temoigner à l'égal d'un musulman?NON
Il faut se garder de croire qu'un Juif peut-être autre chose qu'un dhimmi,dont le statut peut evoluer en fonction des intérêts materiels ou diplomatiques du ROI.

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