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La famille patriarcale – Par Rony Akrich

La famille patriarcale – Par Rony Akrich

 

 

 

Abraham, Isaac, Jacob: ces trois patronymes ne révèlent pas uniquement des natures mais une communauté humaine au sein de laquelle ils incarnent le cœur vivant. La nature hébraïque originelle apparaitrait donc comme liée inexorablement à l’existence de ces trois hommes, dont la particularité essentielle serait justement d’être des Patriarches, c’est à dire’ des « pères ». Le rapport entre le père et l’enfant devient ici prééminent dans la progression sociale de la société hébraïque ancestrale, et le verbe biblique reflète expressément le sens de cette relation: le père et l’enfant sont associés comme la pierre de fondation et la pierre de construction (av- le père et ben- le fils forme cette even- pierre angulaire). La progression de la communauté patriarcale est réaliste, elle aspire à l’érection pas à pas d’une dynastie qui par son esprit saint pourra octroyer à l’humanité un autre ton, une autre teinte. Leur histoire, tout du long, est imprégnée d’un sujet cardinal: l’enfantement constructif. La chose en est tellement essentielle que l’expression « toldot » (engendrements) se retrouve comme un refrain dans le livre de la Genèse ou il deviendra également un synonyme de « l’histoire ». Ce premier résultat permet de définir leurs épouses comme des Mères au côté des Pères ainsi qu’une assise collective de la famille hébraïque. Celle-ci sera composée non point par les seuls géants mâles mais surtout par des couples emplies de mystère: Abraham et Sara, Isaac et Rébecca, Jacob et Rachel.

La particularité de ces couples s’incarne dans leur amour dont la loyauté n’a d’égale que leur ferveur passionnée. On ne rencontre que très rarement des manuscrits, historiques ou littéraires, qui expriment l’amour intime avec autant de discrétion, d’attraits délicieux, d’idéal lyrique que la Genèse. C’est au travers de sublimes scènes que nous sont dépeints les soubresauts du sentiment. Itzhak est aux champs, lorsqu’approche de lui la caravane du serviteur de son père Abraham. Sur l’un des chameaux, Rébecca, la jeune fille dont les gestes gracieux et les paroles généreuses ont frappé le serviteur et qui a accepté de le suivre. Apercevant au loin Itzhak, elle se penche vers le serviteur et lui demande, quel est cet homme qui marche dans les champs? C’est mon jeune maître lui répond-il. Alors Rébecca prend son voile et se couvre, Itzhak l’emmena dans la tente, de sa mère Sarah morte plus tôt, l’épousa et l’aima. Jacob, voyant arriver Rachel, sent ses forces soudain décuplées: il roule à lui tout seul, la pierre si lourde du puits, abreuve les brebis de Rachel, embrasse la jeune fille et pleure d’émotion.
Qu’elles soient redoutablement courtes, comme pour Jacob et Rachel, qui meurt très jeune, ou qu’elles s’éternisent dans le temps, comme pour Abraham et Sarah, Itzhak et Rébecca, la teneur de leur amour jamais ne déprime. Il s’entretient aux grâces d’une loyauté mutuelle, de conversations sérieuses, d’un esprit délicat qui consacrent, comme un diadème de plaisir, l’amour des conjoints. Les imprévus seront innombrables et de nature diverse mais le plus dramatique restera ce péril en la demeure des patriarches: l’infécondité des Mères. La promesse de la « maison» des Hébreux ne pourra se faire, pourtant, qu’au travers des engendrements. Qu’en sera-t-il pour demain?… 

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